En 1973, le Chicago Board Options Exchange bouleversait la donne en lançant les premiers contrats d’options standardisés : une innovation qui a redéfini la manière dont marchés et investisseurs abordent risque et spéculation. Pourtant, la plupart des particuliers l’ignorent : vendre une option peut vous exposer à des obligations sans limite si le marché tourne soudainement à votre désavantage.
Dans l’ombre des salles de marché, certaines stratégies d’options font figure de piliers chez les institutionnels, mais restent largement hors de portée du grand public. Ici, rien n’est vraiment intuitif. Les règles du jeu, les droits et devoirs de chaque partie, le calcul de la valeur d’un contrat : tout obéit à des logiques techniques, parfois déroutantes pour qui n’en maîtrise pas les codes.
Les options sur actions : de quoi parle-t-on vraiment ?
Si l’on s’aventure dans la mécanique des marchés, l’option s’impose comme un pilier incontournable. Il s’agit d’un contrat dérivé : à travers lui, l’acheteur obtient un droit, pas une obligation, d’acheter ou de vendre un actif sous-jacent à un tarif fixé d’avance, dans une période donnée. Longtemps réservées aux pros de la finance, les options gagnent aujourd’hui du terrain chez les particuliers. Pourtant, leur fonctionnement reste exigeant. Actions, obligations, indices, matières premières, devises : le choix des sous-jacents reflète toute la créativité de l’ingénierie financière.
Le marché s’organise autour de deux grandes familles : option d’achat (call) et option de vente (put). Un call ouvre la porte à l’achat d’un actif au prix convenu ; un put permet de le vendre. Derrière ce découpage apparemment simple se jouent des enjeux de taille pour la gestion du risque et la construction de portefeuilles. Les grandes places comme le CBOE à Chicago, Euronext à Paris ou AEX à Amsterdam orchestrent la cotation de ces produits. Euronext, pionnière, propose même des options à échéances journalières sur le CAC 40 et sur certaines actions.
Mais l’option ne se limite pas aux actions : tous les grands actifs financiers sont concernés. L’innovation produit et la sophistication croissante rendent la lecture du carnet d’ordres plus technique. Selon les objectifs, couverture, spéculation, gestion fine du portefeuille, il existe différents types d’options, adaptés à chaque besoin. L’abondance d’échéances possibles et la standardisation des contrats sur les grandes places mondiales facilitent l’accès, tout en exigeant une réelle discipline.
Comment fonctionnent les options et quels sont leurs principaux mécanismes ?
Entrer dans l’univers des options, c’est apprendre à jongler avec des paramètres précis. La prime, d’abord : c’est la somme versée par l’acheteur au vendeur, en échange du droit d’exercer ou non l’option avant la date d’expiration prévue. Pour l’acheteur, la perte est bornée à la prime. Pour le vendeur, le risque peut s’avérer vertigineux si la position prise expose à des mouvements extrêmes.
On retrouve ensuite le prix d’exercice (strike), c’est-à-dire la valeur à laquelle l’acheteur pourra, selon le contrat, acheter (call) ou vendre (put) l’actif sous-jacent. Ce droit n’est exercé qu’en cas d’avantage : si le marché évolue au-delà ou en-deçà du strike. Deux styles principaux s’affrontent : américain (exerçable à tout moment jusqu’à l’échéance), européen (uniquement à l’échéance). En général, un contrat porte sur 100 actions, avec des variations selon les marchés.
La valeur d’une option se décompose : d’un côté, la valeur intrinsèque (différence positive entre le prix d’exercice et le prix du sous-jacent), de l’autre, la valeur temps, qui traduit l’anticipation d’un scénario favorable d’ici l’échéance. Autre notion incontournable : la moneyness, ou la position de l’option par rapport au cours du sous-jacent : “dans la monnaie”, “à la monnaie”, “hors de la monnaie”.
Enfin, le mécanisme d’assignation : si l’acheteur exerce son droit, le vendeur doit honorer sa promesse. Selon le contrat, il s’agira d’une livraison physique de l’actif ou d’un règlement en espèces. Maîtriser ces rouages permet de bâtir des stratégies fines, qu’il s’agisse de se protéger ou de rechercher un effet de levier.
Stratégies courantes : comment les investisseurs utilisent-ils les options ?
Dans la pratique, les investisseurs se servent des options avec une inventivité qui force le respect. Pas de recette unique, mais une multitude de tactiques, chacune conçue pour répondre à des besoins très spécifiques : limiter les pertes, profiter d’une volatilité attendue ou encore générer des revenus réguliers. Voici les usages les plus répandus :
- La spéculation séduit les amateurs de paris sur la volatilité. Grâce à l’effet de levier propre aux options, il est possible de miser sur une hausse (call) ou une baisse (put) du cours, pour un coût bien inférieur à l’achat direct de l’actif sous-jacent. La perte maximale reste cantonnée à la prime versée.
- Pour les détenteurs d’actions, la couverture consiste souvent à acheter une option de vente (put) pour se protéger d’une éventuelle chute brutale du marché. La stratégie du “protective put” en est l’exemple type : on conserve son titre, mais on se met à l’abri d’un crash inattendu.
- Côté génération de revenus, la vente d’options d’achat (covered call) se taille une place de choix. L’investisseur, déjà propriétaire de l’actif, encaisse une prime et accepte de vendre en cas de hausse. Une façon de valoriser une position jugée stable, tant que le marché ne s’emballe pas.
Il existe d’autres montages plus sophistiqués. Citons par exemple le straddle : acheter simultanément un call et un put sur le même actif, au même prix d’exercice et pour la même échéance, permet de miser sur une forte volatilité, peu importe la direction prise. Pour piloter ces stratégies, les professionnels s’appuient sur ce qu’on appelle les Grecs (Delta, Gamma, Vega, Theta, Rho), des indicateurs qui mesurent l’exposition aux différents facteurs de risque. La volatilité, elle, règne en maître : elle fait grimper ou baisser la valeur des primes et influence en profondeur le choix des stratégies.
Ce qu’il faut retenir pour choisir ses options en toute confiance
Chaque contrat d’option repose sur trois piliers : la prime, le prix d’exercice et la date d’expiration. Trois points de repère indispensables : la prime rémunère le risque, le prix d’exercice balise le potentiel de gain, l’échéance fixe le calendrier. Le choix d’une option ne se limite pas à une anticipation sur le mouvement d’un actif : il faut aussi tenir compte du facteur temps et de la volatilité qui anime le marché sous-jacent.
La valeur d’une option conjugue deux dimensions : l’intrinsèque, qui correspond au bénéfice immédiat si l’option était exercée à l’instant ; la valeur temps, quant à elle, se réduit à mesure que l’échéance approche. Le fameux effet de levier permet de s’exposer à un actif pour une mise de départ réduite : dans tous les cas, l’acheteur ne peut perdre plus que la prime initialement investie.
La notion de moneyness, dans la monnaie (ITM), à la monnaie (ATM), hors de la monnaie (OTM), éclaire la relation entre le prix d’exercice et la valeur actuelle du sous-jacent. Ce critère guide l’analyse : une option “dans la monnaie” a une valeur intrinsèque positive, une option “hors de la monnaie” ne conserve que de la valeur temps.
Les professionnels examinent les Grecs : Delta mesure la sensibilité au sous-jacent, Gamma la variation de Delta, Vega la réaction à la volatilité, Theta la dépréciation liée au temps, Rho l’influence des taux d’intérêt. La volatilité reste un paramètre majeur : plus elle grimpe, plus la prime augmente, ce qui rend le choix des options aussi exigeant qu’un exercice d’anticipation et de finesse.
Face à l’univers des options, la vigilance s’impose : chaque décision engage, chaque contrat peut transformer l’expérience boursière. Pour qui maîtrise ses codes, c’est un terrain de jeu aussi risqué que fascinant ; pour les autres, un rappel que la finance ne se dompte jamais sans apprentissage.


